Pourquoi le Yoga ? II (alt. 11m)

(Billet personnel)


Bali. Suite d'un voyage en solitaire commencé en Chine. Ile paradisiaque. Esprits de la nature. Rizières. Verdoyance. Aventure. Océan. Diversité. Liberté. Deux roues. Rencontres. Bienveillance. Sourires. Yoga.

Dix jours de pratique quasi quotidienne de divers styles de Hatha Yoga m'ont permis une première incursion en cette terre presque totalement inconnue.

Kundalini, vinyasa, ashtanga vinyasa et hatha furent mes premières rencontres. Mon corps, mon coeur et mon esprit avaient grand besoin d'une remise à zéro et d'un réalignement.


Pour conclure le premier cours de ha-tha auquel j'ai assisté, l'enseignante suggéra de "s'envoyer à soi-même (une émotion positive) ce dont on pensait avoir le plus besoin". Ce qui eut pour résultat de me faire fondre en larme, brièvement mais intensément. J'ignorais alors que j'entamais la reconquête de mon propre coeur, la reconquête de moi-même. Un peu hésitante mais charmante et pleine de bonne volonté, j'ai aujourd'hui le sentiment que l'instructrice ne partageait pas le yoga avec autrui depuis très longtemps, sa fébrilité était palpable. Le fait de se voir proposer un petit questionnaire avec notation de l'enseignante au sortir du cours fut une expérience frappante de par sa simplicité et son expressivité.

Le vinyasa m'a moins parlé, sans doute à cause du niveau général des participants et de l'absence d'instructions pour débutants (ou de mon incapacité à les écouter). J'ai surtout souvenir d'une classe très rapide, et d'avoir eu le sentiment de ne pas être tout à fait à ma place.

Le professeur de yoga kundalini était intense, avec son turban blanc et ses grands yeux fixes et perçants à la fois. Pratique dont j'ignorais la teneur à l'époque. Mais je pressentais qu'elle avait un grand potentiel. Ce mot mystérieux de "Kundalini", déjà... qui à lui seul renferme tous les secrets de sa profondeur. Sans même savoir ce qu'il signifie, on est déjà transporté par ses fréquences.

Que dire alors de l'"Ashtanga Vinyasa Yoga" ? Ça ne roule pas sur la langue. Oui. Et là aussi, l'imagination prend le relais. Rapidement supplantée par l'intensité de sa physicalité, il offre dès les premiers contacts une connexion à son corps tout simplement grandiose. 

Postures enchaînées, dansées, au rythme de sa propre respiration et de la guidance du solaire Fernando Pacheco, création d'une chaleur intense, transpiration purificatrice, ressac de l'océan résonnant dans la gorge, la poitrine et l'âme, yeux focalisés sur des points précis en permanence, périnée et bas du ventre "engagés"... la multiplicité des points de concentration nécessaires pour commencer à "bien" pratiquer est telle que même l'esprit le plus dispersé, aura, au moins pendant quelques temps, un aperçu de ce que le yoga a à offrir au terme d'une de ses nombreuses phases :
"Yoga citta vrtti nirodha" nous disent les Sutras. Le Yoga est la cessation ou le contrôle des fluctuations de l'esprit. Encore une parmi tant d'approches différentes. Révélée ici par le degré de présence nécessaire au débutant de bonne volonté.

Après seulement quelques jours, aidé par l'enveloppante chaleur balinaise et mon (modeste) passé d'artiste martial, je me découvre une souplesse et une aisance jamais vues. Combinées aux encouragements de Fernando à poursuivre dans cette voie, je me retrouve dans une vibration de bien être et de potentiel considérable. Esprit concentré, sentiment du "je" apaisé, je souffle un peu pour la première fois depuis longtemps.

Hélas, l'alternance entre eau douce et eau salée favorisant le terrain pour certaines bébêtes (selon le médecin), je me retrouve avec une formidable infection à l'oreille. Des douleurs atroces, pulsations de souffrance du tympan jusqu'à la mâchoire m'empêchant même de manger (et surtout de surfer), prévues pour durer un "certain temps" me conduisent à quitter le pays afin de rejoindre deux amis.

Au Vietnam. Pays que nous traverserons à moto sur trois semaines. Sourires, nourriture goutue, paysages féeriques, nature immaculée, villes polluées, accueil chaleureux, jungle, chaleur, poussière, méfiance passagère, lourd passé, marteaux, faucilles, sourires. Ou comment résumer une aventure extraordinaire, enrichissante et profondément marquante en quelques mots.

Quelques années à travailler dans l'hôtellerie de luxe ont suffit pour devoir envisager un changement de carrière. Celles-ci se sont déroulées en saison. Des hivers entiers à skier à haute fréquence m'ont permis d'acquérir un niveau et un amour de la chose tels que lorsqu'un changement de carrière s'est imposé, je me suis clairement visualisé transmettre la glisse à autrui.
Mais ce projet fut fort heureusement avorté et les encouragements de Fernando me revinrent à l'esprit. Hum. Pourquoi pas. Si transmettre le ski n'est pas possible alors pourquoi ne pas envisager de transmettre un beau jour, ce qui semble être si naturel chez moi ?

J'étais loin de me douter que le Yoga est l'un de ces domaines où la transmission sous-jacente, sub-consciente importe autant, voir plus encore que ce qui est transmis en apparence, consciemment. Tout comme je n'aurais jamais penser commencer à transmettre à des proches quelques semaines à peine après être rentré, et à des inconnus quelques semaines plus tard déjà...

Tombant dans le terrible (pour ne pas dire risible) panneau de ceux qui pensent avoir compris suffisamment du yoga pour le partager sous prétexte qu'ils parviennent à exécuter des postures complexes correctement (voir certains danseurs, acrobates et artistes martiaux reconvertis ; sur instagram et autres). Fort heureusement je n'ai fait que peu de dégâts, ayant toujours eu le minimum d'empathie nécessaire à la mise en garde et à la tempérance des élèves trop volontaristes. Même si j'aurais aimé en avoir bien plus encore dès le début.

Trois semaines à chevaucher nos copies chinoises de Hondas furent autant de temps passé à méditer sur nos vies et donc sur le futur. Ma décision est prise : je vais me former en yoga. Quelques recherches internet, quelques questions auprès de Fernando, et c'est parti !

Mysore, Karnataka, Inde du sud. Trains bondés, curiosité des locaux, rouler à tombeau ouvert par défaut, choc des cultures, pauvreté, saleté, gentillesse, yeux grands ouverts - brillants de conscience spirituelle, épices, chai, noix de coco, hochement de tête latéraux, saris, hommes se tenant par la main, couleurs chatoyantes, odeurs intenses, vaches, klaxons, tourbillon de vie qui donne le tournis.

À peine arrivé, l'entraînement commence.


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